Visite au prince Émerick

Les gardes, postés à l'entrée de la chambre du prince orcadien, saluèrent la reine Ophélia d'Orcanie lorsque celle-ci s'approcha du lieu où le prince Émerick avait vécu, tout au long de son long séjour en Orcanie.
Un malaise s'installa entre eux, alors que l'impénétrable s'arrêta devant eux (car il lui barrait le chemin).

- Veuillez nous excusez, Votre Altesse, mais le roy a interdit à quiconque de rendre visite au prince Émerick.

Fulminante, la souveraine ne leur répondit pas et les écarta. Ils ne réagirent pas, incapable de savoir ce qu'il devait faire en de tel cas.
Seule Ophélia pouvait contredire les ordres du roy... en quelques rares temps. Celui-ci, depuis quelques semaines, semblaient l'avoir placé au même rang que lui, la laissant prendre quelques décisions (certes, de peu d'importance... mais parfois, il se laissait aller à l'intelligence de cette dernière). Que devait-il faire en de pareil cas?

- Va avertir le roy... ordonna l'ainé au cadet.

Ce qu'il se dépêcha à faire.


Ophélia entra dans la chambre d'Émerick, assied près du feu, alors que des serviteurs s'empressaient à remballer les affaires personnelles du prince.

- Émerick... souffla l'enfant-reine, qui sentait son coeur battre à une vitesse anormale dans sa poitrine.

Elle s'approcha quelque peu du prince, en conservant une certaine distance. Elle sentit son corps se pincer, alors qu'elle s'arrêta, tremblante de peur et...? Non. Elle était mariée, mère et reine.
Elle ne pouvait aimé que Mordred... et leur terre.

- ... est-il vrai que vous épouserez Dame Blanche? demanda t'elle, d'une voix incertaine, presque éteinte.

La rumeur courait dans le château.
Cette catin du diable lui avait volé une fois son époux. Lui volerait-elle également cet homme qu'elle tenait en haute estime?

La douleur dévorait son corps entier, consumé parce qu'elle n,avait jamais pu imaginer.
Son esprit était en chute libre... la dispute qui avait eu lieu quelques heures auparavant l'ayant perdue.

Émerick n'attendait personne et ne voulait surtout voir personne ... Il avait été stupide face à Mordred et s'était royalement ridiculisé devant Ophélia ...
Ne lui restait plus que de partir et d'oublier tout ce qui le retenait en orcanie ...

Pendant que des serviteurs faisaient ses bagages, la prince héritier, lui, regardait par la fenêtre, son regard perdu dans l'horizon ...
Un serviteur désirait lui poser une question, mais il ne réagissait plus ...
C'est comme s'il venait de tout perdre ...

Il était responsable de la souffrance de nombreux coeurs et maintenant, par stupidité, il avait fait du mal à sa soeur ...

Il était perdu dans ses nombreuses pensées, lorsqu'il entendit :

- Émerick...

Cette voix ... Celle d'un ange ... Celle d'ophélia ...
Doucement, il se tourna et la vit ...

Il était honteux de la regarder, après cette humiliation et surtout, il était malheureux de la regarder en tant que Reine ...

- ... est-il vrai que vous épouserez Dame Blanche?

Ce fut un pincement de coeur qui prit le prince ...
Comme un couteau si bien affilé que l'on enfonce dans le coeur d'un homme, traversant sa chair et son âme ...

- Je ne vous mentirez pas ...
Il est vrai que, bien avant Mordred, j'avais posé les yeux sur elle, mais elle a préféré votre époux ...
Voyant cela, je me suis tourné vers une femme en détresse, une femme qui souffrait de cela ... cette femme, c'était vous ...

Maintenant, je n'ai plus de chance de pouvoir vous aimer, même si j'ai tout fait ...
Que fait le coeur d'un homme quand il est meurtri, ravagé, blessé ? ...
Il se tourna vers ceux qui ne l'on pas abandonné ...

L'épousez, je ne sais pas encore, mais elle serait mon unique chance de trouver le bonheur ...

Il aimait Blanche, il aimait Ophélia ...
Une était libre, l'autre mariée ...
Et son coeur à lui était torturé ...

- Ne vous attirez pas d'ennuis en venant ici ...
Mordred l'a dit, je ne suis qu'un prince de carnaval ...
Ne perdez pas votre temps avec moi ...

- Bien, en ce cas! dit la reine, plus blessé qu'elle n'avait cru l'être.

Cette femme... Blanche... Elle la détruirait.
Elle lui avait volé son époux. Elle lui avait volé sa semence et avait donné vie à une menace éventuelle. Car nul ne savait qui était le véritable père des héritiers d'Orcanie... alors que Blanche... elle... avait donné naissance à une fille qui était bien celle de Mordred.
Et maintenant, elle lui prenait Émerick.
Le malheur s'abattait sur elle... et le nom de ce malheur savérait être celui d'une femme qui se jouait d'elle.

- Je ne perderai plus jamais mon temps auprès de vous.

Vexée, elle se retourna pour resortir de la chambre, avec un mince espoir...
... La retiendrait-il?

Encore une fois, il avait manqué de tact ...
Pourquoi fallait-il qui blesse tous ceux qu'il aime ? ...

Alors qu'ophélia partait, Émerick se dépécha et la retint par le bras ...
Ce contact devint presqu'un acte défendu et il enleva sa main aussitôt ...

- J'aimerais pouvoir vous garder pour moi, parce que je vous aime et ca vous le savez très bien ...
L'autre jour, ce ne fut qu'un baiser, mais pour moi, ce fut l'éternité ...

Il la fixa dans les yeux, puis dit :

- Les Dieux vous ont tout donné ...
Mais ils m'ont tout prit ...
Et tout donné à votre époux ...

Mordred ne vous ferait jamais mal, mais moi, il me tuerait de sang froid ...
J'aurais aimé lui dire ce que je pensais de lui, mais ma vie en dépendait ...
Sans vous, je préférerait être mort, plutot que de souffrir d'amour ...

Ophélia scruta le regard aubrun du prince, sans y perçevoir une quelconque lueur.
Ce qu'elle avait aimé, cette petite flamme vivante, dure (voire même virile), sensuelle... presque brusque... n'était plus. Il ne survivait que la douleur.

- Vous trouverez tout le réconfort dans les bras de la catin de mon époux! siffla t'elle, mécontente, blessée. Pourquoi me mentir, Émerick? Je vous ai fait suivre... moult informations m'ont étés rapportés.
Ne me faites donc pas plus souffrir. Vous aimez la maîtresse de mon époux!
Soit!
Mais je vous souhaite tout le malheur que vous m'avez fait!
Ne comptez pas vivre une vie longue et heureuse! Car tout au long de votre existence, je vous ferai traqué! Et jamais, oh grand jamais, je ne vous laisserai de répis!

Je suis reine. Mais je suis aussi une femme.
Et je ne permettrai pas que l'on se moque de moi si facilement!

Souffrez, monsieur, que je vous reprend mon coeur!

Adieu!

Elle lui tourna le dos.
Émerick avait prononcé les mauvaises paroles.

Vous trouverez tout le réconfort dans les bras de la catin de mon époux!
Pourquoi me mentir, Émerick? Je vous ai fait suivre... moult informations m'ont étés rapportés.


Non ...!

Émerick la voulait elle ...
Il voulait Ophélia ...
Il la retint à deux mains et lui dit:

- Faut-il que je mette mon âme à nue pour vous dire que je vous aime ? ...
Ophélia d'Aurey, mon coeur souffre de vous voir dans cet état ...
Je vous aime et vous aimerai toujours parce qu'il n'y a qu'une femme qui soit plus belle que la Beauté même ...
Et c'est vous ...
Ma seule lumière ..

Il glissa sa main dans celle de la Reine et dit:

- Je ne suis qu'un fou ...
Un fou d'amour ... pour vous ...
J'ai essayé d'être un homme de valeur, pour vous, mais ai-je échoué ?
Je me suis cru le roi, mais je ne suis personne ...

- En effet! Vous n'êtes personne... dit la reine, dont les yeux couleur de l'océan se remplissait de perles salées. ... alors que vous auriez pu être quelqu'un!

Leurs mains demeurèrent longuement liés, leurs regards plongés l'un dans l'autre, comme deux cruches d'eau dans lesquels l'eau se déversaient tour à tour.

- Si réellement vous m'aimez, provoquez le roy dans un duel en dehors des terres d'Orcanie, en dehors de vos terres.
Celui qui remportera cet affront à mort gagnera le royaume d'Orcanie, mon coeur tout entier.

L'épreuve était dangeureuse, mortelle, mais irréalisable. Et c'était pourquoi Ophélia l'avait prononcé...
Si Émerick était assez fou pour affronter le roy, Mordred serait-il assez sot pour accepter?
Le fils de Morgause ne se battait jamais personnellement... il engageait toujours quelqu'un pour le faire.
Il était le supérieur... jamais l'égal.

Émerick pensa longuement aux paroles de la souveraine ...
C'était son unique chance, il n'avait plus rien à perdre ...

- Je le ferai ...
Si je dois y laissez ma vie, alors soit ...
Je me fou de mon âme, je l'ai perdu déjà ...

Il était tombé sur la tête, mais il choississait cette option ...
Il préférait se battre pour elle et courir la chance de mourir, que de s'éteindre petit à petit sans amour ...

Il regarda Ophélia et dit:

- Je peux devenir cela que j'aurai pu être ...
Je le deviendrai pour vous ...
Je le ferai pour vous ...

Personne ne m'avait dit qu'amour rimait avec jalousie

- Alors, vous vous avérez réellement fou, mon prince! soupira la reine, après avoir coupé tout contact physique avec celui qui avait écorché son orgueuil royal.
Sur ce, il se fait tard.
Je vous souhaites une excellente nuit et que Dieu vous protèges...

Elle lui sourit, plus attristé et anxieuse qu'heureuse, avant de se retourner, d'ouvrir la porte et... de constater qu'un seul garde demeurait.
Son époux ne tarderait pas...